À moins de vivre sur une île déserte sans accès à l’actualité, vous avez probablement entendu parler récemment des contaminants émergents appelés PFAS, largement médiatisés en raison de leur accumulation dans nos milieux de vie — notamment la contamination de puits municipaux au Québec ou leur présence croissante dans la chaîne alimentaire1.
Mais que sont exactement les PFAS, et pourquoi est-il impératif pour l’humanité de s’engager rapidement dans leur élimination?
L’acronyme PFAS désigne les substances per- et polyfluoroalkylées (en anglais per- and polyfluoroalkyl substances), une famille de composés chimiques synthétiques. Utilisé tel quel en français, cet acronyme regroupe des milliers de substances présentes dans une vaste gamme de produits de consommation et d’applications industrielles.
Depuis les années 1940-1950, les PFAS ont malheureusement la cote pour leurs propriétés chimiques : résistance à la chaleur, à l’eau, aux graisses, et faible tension superficielle. On les retrouve comme agents tensioactifs, lubrifiants, ou répulsifs dans des produits tels que les vêtements imperméables, les revêtements antiadhésifs, les tapis, les emballages alimentaires, les produits de soins personnels, les mousses extinctrices, ainsi que dans des équipements militaires. Ils sont aussi utilisés dans divers procédés industriels, notamment en métallurgie, dans les batteries électroniques, les peintures et bien d’autres secteurs. En résumé, les PFAS sont omniprésents dans notre quotidien.
Cela signifie que, dans des gestes de tous les jours, que vous achetiez un hamburger dans une chaîne de restauration rapide ou que vous cuisiniez à la maison avec une poêle antiadhésive, vous êtes potentiellement exposé à ces substances.
Le problème majeur des PFAS réside dans leur persistance. Ce sont des composés chimiques dits « persistants » qui ne se décomposent ni dans le corps humain ni dans l’environnement. Cette caractéristique soulève de vives préoccupations quant à leurs effets sur la santé et sur les écosystèmes. Bien que les recherches en soient encore à leurs débuts, les études disponibles indiquent déjà que l’exposition aux PFAS peut affecter plusieurs systèmes et organes humains, notamment le foie, les reins, le système immunitaire, la reproduction, ainsi que le développement fœtal.
Sur le plan environnemental, leur très faible biodégradabilité entraîne une accumulation durable dans les sols, les sédiments, l’eau, et même l’air. Leur potentiel de bioaccumulation dans les chaînes alimentaires végétales et animales, et ultimement humaines, pourrait entraîner des conséquences majeures, comparables à une véritable bombe à retardement. Leur concentration dans les tissus et organes humains pourrait devenir particulièrement préoccupante.
En mars 2025, le gouvernement du Canada a publié un rapport détaillé sur la situation des PFAS au pays2. À l’échelle mondiale, les législateurs commencent progressivement à bannir certains PFAS de la production industrielle ou à encadrer leur concentration dans l’eau potable.
Au Canada, un premier geste concret a été posé récemment : le gouvernement a fortement incité les services d’incendie à abandonner les mousses extinctrices contenant des PFAS au profit d’alternatives sans PFAS3. Ce changement représente un pas important dans la bonne direction.
Une carte interactive du Canada répertoriant les endroits contaminés au PFAS a été publiée récemment dans les médias4.
À court et moyen terme, le bannissement des PFAS dans les produits de consommation courante constitue la voie prioritaire pour réduire rapidement leur présence dans l’environnement, tout en investissant parallèlement dans le développement de technologies permettant leur destruction complète.
Actuellement, les technologies les plus répandues pour éliminer les PFAS dans l’eau potable sont la filtration sur charbon actif et la filtration membranaire. Toutefois, ces méthodes ne détruisent pas les PFAS. Elles les captent simplement afin que l’eau traitée en soit exempte. Les déchets générés — charbons saturés, résines usagées ou concentrats — doivent ensuite être gérés comme des déchet dangereux, et non simplement enfouis.
Les PFAS représentent donc une problématique complexe, qui continuera de défier l’humanité pendant de nombreuses années et fera indéniablement grimper les couts de traitement de l’eau5. Mais il convient de rester optimiste quant à la capacité humaine à innover pour faire face à ce défi.
Rappelons-nous qu’il n’a fallu que deux ans entre la publication dans Nature en 1985 de la découverte du trou dans la couche d’ozone par des chercheurs britanniques, et l’adoption du Protocole de Montréal en 1987, interdisant les CFC (chlorofluorocarbures) — substances alors largement utilisées dans les aérosols et l’industrie du froid, et responsables de cette dégradation de l’ozone.
Référence :
4 https://newsinteractives.cbc.ca/features/2025/pfas-canada-map/